Avec son copilote Arnaud Dunand, le pilote de l’équipe de France Rallye occupe la tête du
WRC2, fidèle à Citroën et à la C3 Rally2.
Quand on regarde dans le rétro, le parcours de Yohan Rossel ne laisse personne indifférent. Issue de
la filière Rallye Jeunes, le pilote Gardois considère qu’il a touché le gros lot, ce jour de 2013.
A l’issue des finales de cette opération de la FFSA, il n’imaginait pas que quelques années plus tard, il serait en tête du WRC2 en ce mois de juin 2023 après avoir gagné le Monte-Carlo puis le Rallye de Croatie pour attaquer une saison bille en tête. Et ce, comme ce fut le cas depuis le titre de Champion de France junior acquis haut la main, en 2014, et un sans faute avec le gain de la totalité des manches. « Je peux dire que parmi les éléments importants de ma carrière, la Fédération Française et son soutien indéfectible – conjointement à celui de Citroën – ont été déterminants, bien que n’étant pas les seuls ». En effet, le Cévenol, copiloté longtemps par son copain de club, Benoit Fulcrand, est toujours resté fidèle au groupe Stellantis, et, depuis son titre de champion de France des rallyes, à Citroën qui aura accompagné son ascension.
A l’issue d’un récent Rallye de Sardaigne très compliqué, Yohan fait le point de manière clairvoyante. La lucidité et le pragmatisme étant deux des qualités qui complètent un coup de volant exceptionnel et reconnu.
La gloire au Monte-Carlo, la Galère en Sardaigne
« En Sardaigne, si on y réfléchit, le résultat n’est pas si mauvais que ça. On finit quatrième en essayant de rouler quand même et en dépit des problèmes que nous rencontrions. En début de saison nous avions beaucoup travaillé sur les set up de l’asphalte. L’auto était parfaite et d’ailleurs nous avons gagné le Monte-Carlo et la Croatie de manière idéale. Quand nous sommes arrivés sur le rallye du Portugal il s’est avéré qu’il y avait inadéquation entre le réglages de l’auto et les nouveaux Pirelli. Ils pèsent 2 kilogrammes de plus que l’ancienne version. Du coup, sous la pluie, dans le sable, l’auto devient très vicieuse et avec Arnaud nous nous sommes faits plusieurs chaleurs en roulant parfois hors limites. Néanmoins, si au Portugal, le terrain est difficile, nous espérions un Sardaigne sur le sec et dans la poussière comme c’est le cas, habituellement. Pas de chance, c’était 100% de la boue avec les pluies qui se sont abattues. Dès lors, il s’agissait de faire le dos rond, de rouler intelligemment. Toute l’équipe s’est serré les coudes. C’est ce qui fait notre force… » précise Yohan.
Finalement, ils finissent 4èmes du WRC2 et accentuent leur position en tête. Ils accrochent même les points de la Power Stage mais celle-ci sera finalement annulée !
L’équipe, maître mot de la réussite
Désormais, toute l’équipe PH Sport est sur le pont pour résoudre le problème de manque de motricité sur terre. Yohan et Arnaud ne veulent pas jouer à pile ou face sur chaque rallye. « Dans ces cas là pour s’en sortir, il faut aller au-delà de la limite raisonnable. Et quand on a frisé la correctionnelle au long du chrono, on baisse dans la confiance. Fatalement, on lève le pied par endroit avec dans la tête de ramener l’auto. Ceci dit, il faut relativiser, on ne peut pas être toujours devant mais on ne peut pas finir la saison dans de telles conditions. Il nous faut une auto efficace sur toutes les surfaces…»
Mais Yohan préfère voir le verre à moitié plein plutôt que se plaindre. « Notre force c’est une équipe très soudée. On se comprend sans se parler car je connais tout le monde depuis le titre de champion de
France asphalte. Toutes les composantes de l’équipe sont au diapason : du mécano, au météorologue, à l’ingé, au coordonnateur, à l’équipage. Et c’est la bonne stratégie. Quand on est au plus mal on finit 4ème. Y’a pire ! Et n’importe comment je ne fais pas ce que je ne sais pas faire…»
Nul doute que la capacité de terminer les rallyes est un atout et notamment auprès de Citroën. En presque 100 rallyes, Yohan est très peu sorti, et notamment à ce niveau. Il a toujours vu la ligne d’arrivée en WRC, parfois avec un petit passage par le Rallye 2.
Un seul but le WRC1
« J’ai un statut de pilote pro. 98% des pilotes aimeraient être à ma place. Je ne vais pas me plaindre. Néanmoins, j’entends bien coché toutes les cases. J’ai validé celle de champion WRC3, je veux celle du WRC2 et ensuite le WRC1. Mais les places sont chères. C’est une question d’opportunité. Dans les 10 premiers on a tous le potentiel pour rouler en WRC1. Je dois ma carrière à un nombre important de personnes que je remercie mais devant les choix, j’ai pris mes responsabilités. Soyons honnêtes, à mes débuts j’avais 4% de chances d’arriver là! Donc c’est le rêve qui se réalise. Deux années en arrière, on m’aurait dit que j’en serais là, je signais des 2 mains.
Je me dis que si avec les moyens de mes débuts on arrive à ce niveau cela doit donner de l’espoir pour d’autres jeunes…. Je veux vivre le mondial jusqu’au bout mais je ne ferai pas 5 ans de plus en WRC2. »
Propulsé consultant par Peter Solberg
Cette saison Yohan se retrouve dans l’habit du « représentant syndical ». Peter Solberg, vice président de la commission WRC lui a demandé une sorte d’audit sur l’évolution du WRC et notamment de l’accession au haut niveau. « Il estime que mon parcours est particulier et que mon expérience peut apporter de l’eau au moulin. Du coup, je lui ai notamment expliqué que selon moi, ce n’est pas au niveau du WRC2 que cela coince. C’est bien en amont. Quand on voit qu’en WRC3, on a seulement 8 voitures et un seul constructeur, c’est un problème. Mais il n’y a pas que ça… »
Du coté de l’ambiance en WRC, le Gardois est positif. « Le départ tragique de Craig (Breen) nous a tous soudés. J’ai des affinités avec Ogier Sordo, Loubet… et je me ressens comme étant de la même famille. Certes nous ne sommes pas du même milieu. Certains avaient plus d’atouts que d’autres mais on a la même vision »…
Et quand la déprime s’annonce, Yohan se réfugie dans le clan Rossel : la famille, son épouse Liza, rencontrée dans le milieu des courses de côte, son fiston, Jules, arrivé l’an dernier, les copains de
la première heure. « Ce sport est beau, ce serait faire injure à la vie que de se plaindre… » conclut-il
Après la Sardaigne, Yohan et Arnaud seront en Finlande, hors championnat puis en Grèce, au Chili et au Rallye d’Europe Centrale avec le titre en ligne de mire.
– Alain Lauret